Agroalimentaire : des gains énergétiques conséquents en optimisant vos flux d’air
L’industrie agroalimentaire consomme beaucoup d’énergie pour assurer la maîtrise de la température et la qualité d’air des zones de travail. Bien souvent, quelques actions simples permettent de réaliser des économies substantielles. En voici quelques exemples, pour des ateliers emblématiques de l’industrie agroalimentaire : la salle de cuisson et son extraction d’air d’une part, et l’atelier de confection/conditionnement avec sa centrale de traitement d’air d’autre part.  

Maîtriser l’extraction d’air en salle de cuisson

Les industriels de l’agroalimentaire sont nombreux à faire face au même dilemme : réduire l’exposition à la chaleur de leur personnel en ventilant abondamment les ateliers de cuisson et éviter de contaminer les produits en sortie de four avec un air de refroidissement grossièrement filtré. Pourtant, il est possible de combiner harmonieusement ces enjeux, et quasiment sans CAPEX ! Le refroidissement est généralement confié à des extracteurs d’air, plaçant la salle de cuisson en dépression. Plusieurs dizaines de milliers de m3/h d’air chaud sont ainsi aspirés et remplacés par de l’air « neuf » à température ambiante. « La qualité de cet air neuf peut être très discutable, estime Yves Bergeron, Consultant Industrie. Les prises d’air sont par exemple situées au ras du sol dans l’atelier de maintenance. Les vitesses d’air sont telles que l’effet d’envolement est important. Et celui-ci est en général simplement préfiltré, car il est difficile de filtrer finement de tels flux d’air ». Dans la démarche d’optimisation, une fois n’est pas coutume, la maîtrise de l’énergie et de la qualité microbiologique se rejoignent : le premier levier de progrès concerne l’ajustement de l’extraction d’air au minimum nécessaire pour assurer une température de travail acceptable.  
  |  Un cas concret dans une usine de pain de mie tranché « Le niveau d’extraction était tellement important qu’il aspirait l’air depuis l’autre extrémité de l’usine (la zone de stockage après conditionnement). En arrêtant un des trois extracteurs, l’impact sur la température de la salle de cuisson s’est avéré négligeable, et le phénomène d’aspiration d’air sale a été éliminé. En outre, un tiers de l’énergie consommée a été économisé ! » raconte Yves Bergeron.
  Une autre action très simple consiste à s’assurer que l’extraction ne fonctionne que lorsqu’on en a besoin. Ne démarre-t-elle pas trop tôt, alors que le four et la salle sont encore froids ? Ne s’arrête-t-elle pas trop tard ? « Le nombre et/ou le niveau de marche des extracteurs doivent être ajustés en fonction de la météo (température extérieure et ensoleillement), mais aussi de l’activité de la salle elle-même » propose Yves Bergeron.  

Optimiser le point de fonctionnement de la centrale de traitement d’air

Plantons le décor : la centrale de traitement d’air permet d’assurer la conformité de l’air de la salle pendant la production, par rapport à la norme applicable (température de la salle, qualité microbiologique de l’air). Première piste de travail : optimiser l’énergie dépensée pendant les périodes de hors production. L’enjeu est d’autant plus important si l’atelier tourne peu. Rappelons qu’un atelier qui fonctionne 8 heures par jour, 5 jours par semaine, est trois fois plus souvent hors production qu’en production ! Rappelons que le taux de renouvellement d’air imposé par la norme pendant la production a été calculé pour éliminer la contamination apportée par les flux entrants dans l’atelier (produit, emballages, personnels…). Hors production et hors maintenance, lorsque les portes des ateliers sont fermées et qu’il n’y a aucun flux, ce taux de renouvellement peut être fortement diminué, tout en assurant la qualité microbiologique de l’air nécessaire. La contrainte imposée sur la température de la salle en production est également très probablement excessive hors production. « La norme ne s’applique pas puisqu’il n’y a alors pas de production, même s’il faut bien évidemment s’assurer (et pouvoir prouver) que la qualité de l’air reste maîtrisée, et sera conforme à la norme dès le début de production, rappelle Yves Bergeron. Des actions d’accompagnement classiques hors production consistent à consigner les portes, boucher les ouvertures et couvrir les équipements. Et on sera surpris de constater que la qualité du début de production est souvent fortement améliorée par rapport à la qualité obtenue en laissant la centrale de traitement d’air à fond pendant les arrêts de production. » Ce premier succès légitime la remise en question d’une croyance : « On fait tourner la centrale de traitement d’air à fond. Comme ça on n’a pas de problème ! ». Un petit effort préalable est cependant indispensable : il faut bien connaître la norme applicable. En effet, la bonne compréhension de la norme permet de challenger positivement les responsables qualité et de définir avec eux le point de fonctionnement nécessaire pour le niveau d’activité le plus exigeant. Il devient dès lors possible, en procédant par étapes entrecoupées de longues périodes d’observation, de réduire graduellement le niveau de marche de la centrale de traitement d’air jusqu’à ce point de fonctionnement. Sur certains ateliers, il est même possible d’aller plus loin. « Les besoins réels de renouvellement d’air peuvent dépendre très fortement de l’activité, calcule Yves Bergeron, du nombre de personnes présentes, du flux de produits, d’emballages… Si le produit est tranché et génère beaucoup de particules, ou s’il est refroidi en salle et génère de l’humidité… ». Il n’est pas rare que l’activité la plus exigeante soit en réalité peu fréquente. L’optimisation peut alors se poursuivre pour les niveaux d’activité courants.  

Piloter vraiment pour gagner tout le temps

À l’évidence, adapter le niveau de marche des extracteurs d’air et des centrales de traitement d’air au niveau d’activité et aux conditions météorologiques augmente la complexité. « Une supervision centralisée prend ici tout son sens. D’abord pour historiser sereinement les états de fonctionnement, les rapprocher des données de production, et analyser leurs conséquences énergétiques, à l’échelle de chaque salle. Mais aussi pour identifier les réglages efficaces et les propager à d’autres ateliers. Il n’est pas nécessaire d’aller jusqu’au contrôle-commande, la diffusion de consignes simples avec les plans de production suffit en général » propose Yves Bergeron. Prévoyez une bonne année pour constituer un corpus de données suffisant, puis récoltez les fruits énergétiques : la division par deux de votre consommation est tout à fait envisageable !
  • Posté le 20 décembre 2018
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  • Par F. Gailliot

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